L'ancien beffroi

 

De plus fins érudits étudieront peut-être un jour plus à fond tous ces dessous obscurs et tireront au clair l'histoire des caves saint-quentinoises. Celle qui déroute le plus pour le moment nos connaissances trop courtes est celle de M. Lécuyer, rue Saint-André, dont nous avons parlé, haute de 8 mètres, sous voûte, et située, croit-on, à l'emplacement de l'ancien beffroi, démoli comme caduc à la Révolution.

Il est bien connu qu'après l'incendie de la collégiale, en 883, par les Normands, notre comte-abbé Teutric ceignit le bourg ou vicus de saint Quentin d'une muraille, en retrait de 10 à 30 mètres sur le tour actuel du Gouvernement, et qu'il en fit l'entrée principale rue Saint-André, entre deux tours, dont I'une servit ensuite de beffroi. Il est également connu que saint Louis, en 1257, eut à franchir la porte Saint-André, défendue par ces deux tours. Ce n'est pas après saint Louis qu'on les aurait reconstruites en gothique, puisqu'on avait bâti la grande enceinte; et il est au contraire à présumer que la vieille tour-beffroi, abattue à la Révolution, était toujours celle de Teutric, attendu qu'on la dit, en 1791, massive, grossière et fruste, Il est alors singulier que cette tour du IXe siècle ait reposé sur des voûtes à croisées d'ogives, dont le type ne fut inventé que 250 ans plus tard, les archéologues l'assurent.

On ne cesse de marcher ainsi sur des sables un peu mouvants d'histoire et d'archéologie, D'autres souvenirs encore se rattachent à la cave de M.Lécuyer. ThéophiIe de Viau, vers 1620, y aurait été emprisonné, mais il n'y a pas certitude absolue sur ce point non plus, vu qu'une seconde prison existait depuis le XVIe siècle, on l'a dit, dans la rue Anatole France.

SOURCE : Mémoires de la Société Académique de St Quentin / 1935 / Mr Charles Journel